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Comment subsiste-t-elle, cette ville trahie par ses magistrats, et qui devaient en ouvrir les portes aux troupes des conjurés ?

Lorsque la première nouvelle de la prise de la Bastille fut regardée à Versailles comme une imposture ; lorsque nous lui renvoyâmes la terreur qu’elle nous avait inspirée ; lorsque tous les fronts de la cour pâlirent en apprenant notre fière et majestueuse attitude, ce grand danger ne fut pas encore le dernier pour nous. Il n’y eut pas d’année où nos murailles ne fussent menacées d’incendie ; et la rage des factions qui s’agitaient dans cette immense cité, semblait n’avoir point de murs qui pussent la contenir.

Tandis que des écrivains mercenaires, salariés par les Anglais, ne cessaient de vanter, avec autant d’excès que de perfidie, le calme imposant de cette ville, et la majesté de ses assemblées primaires et permanentes, tandis qu’éclairées par une trop funeste expérience, nous ne cessions nous-mêmes d’inspirer de justes défiances sur ce calme trompeur, et d’appeler l’attention des patriotes de 1789 sur les invasions séditieuses, sur les éclats multipliés, et sur les attentats de ces assemblées primaires, qu’une poignée de factieux entraînait dans les horreurs de la guerre civile, des émissaires travaillaient sourdement ce peuple devant lequel on se prosternait en public. Les royalistes creusaient sous nos pieds un abîme profond, tandis qu’ils couronnaient nos têtes de fleurs enivrantes : les scélérats ! ils parfumaient l’autel sur lequel ils voulaient immoler tous les Parisiens, comme auteurs ou complices de la mort du dernier roi.

Nous donnerons ici quelques développements nécessaires à des faits, légers en apparence, mais dont les suites pouvaient avoir sur le sort de la République Française, la plus meurtrière influence.

Ce fut le jeudi soir, 2 vendémiaire, qu’on essaya au jardin Égalité le jeu des manœuvres concertées dans les conciliabules de la section Lepelletier. On se rappelle qu’une douzaine d’étourdis insulta, dans ce jardin, des Invalides qui avaient crié vive la République ! trois de ces insolents