Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/253

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dons de Cérès et toutes les denrées nécessaires à la vie d’un grand peuple, est maintenant changé en un vaste cabaret, où les hommes qu’un travail constant aidait à supporter le fardeau de la vie, consument aujourd’hui leur temps à boire, à jouer aux cartes, se familiarisent avec l’oisiveté, la paresse, et, pleins de vin, s’endorment, se roulent sur le sein de leurs viles maîtresses.

Le délirant système de la loi agraire semble s’être emparé de toutes les têtes des crédules artisans. Ils s’imaginent que tous les hommes doivent être riches et ne rien faire ; ils font le dangereux apprentissage de l’oisiveté. Boire, rire, chanter parmi de sales prostituées voilà leur suprême félicité. Ils ont encore une vertu de moins, la sobriété : à chaque instant le passant se détourne pour n’être point coudoyé d’un homme ou d’une femme ivres.

Ah ! qu’il est urgent de raviver la confiance, de cimenter la paix générale, de ramener avec elle l’abondance, le travail, les bonnes mœurs et les vertus sociales !

Si ces vœux ne sont pas exaucés, si tous les jours deviennent pour l’ouvrier inoccupé des jours de repos, d’ivresse et de débauche, ces cabarets seront autant d’asiles de prostitution, ils seront autant de cavernes de voleurs, de refuges de factieux, où des chefs hardis, sans crainte des patrouilles, harangueront leurs dociles satellites, les feront mouvoir à leur gré, en leur versant à discrétion du vin, source des discordes civiles et des factions destructrices des empires.


CARTES DE RESTAURATEURS



Vous les recevez en entrant tout imprimées ; c’est une feuille in-folio. Tel, accoudé sur une table, les médite longtemps avant de se décider ; tel tâte son gousset pour savoir s’il a vraiment de quoi dîner, car l’on ne dîne plus