de la peau du renard, qui est le plus astucieux, le plus voleur, le plus carnassier entre les bêtes.
Ils sont en veste, ont des bottes sales, des cheveux gras ; leur mine patibulaire, leur bouche livide, sardonique, leurs yeux qui attirent les porte-feuilles, sont mobiles et clignotants comme ceux des singes qui s’étudient sans cesse à voler sans être aperçus : leur langage est moqueur ou obscène.
Ils se tiennent près des tavernes qui leur servent de repaires ; ils s’y enfoncent et puis reparaissent ; ils vont tendre leurs filets dans des coins obscurs ; puis sortent précipitamment pour donner l’éveil à leurs complices.
À la porte des spectacles, ils n’y entrent jamais ; ils ne lisent pas plus les affiches qui sont sous leurs yeux, que les arrêtés du Directoire et des autorités constituées : on dirait que les lois ne les regardent pas, tant ils sont calmes et froids dans leur inobservance ou leur violation.
Ils boivent souvent, mais peu : la soif de l’or tempère en eux la soif du vin, et leur sobriété n’est pas une vertu, mais une attention à ne point perdre de temps.
Les femmes se mêlent parmi eux, et font le même métier ; elles y mettent plus d’astuce encore, lisent les chiffres beaucoup plus vite que les hommes : la souris qui enlève une miette de pain, et qui se renfonce dans son trou avec la rapidité de l’éclair, voilà leur image : on n’a pas besoin de leur parler ; elles devinent.
Ce n’est point là que l’on vole les porte-feuilles : on y pompe, comme par une force attractive, ce qui est dedans, et d’un ton si simple et si miséricordieux, que ces agioteurs semblent en vous volant, vous avoir rendu un service[1].
- ↑ La Convention ferma les Bourses, puis les rouvrit le 25 avril 1795. Le nouveau local de la Bourse de Paris fut alors l’église et le cloître des Petits-Pères ; par un décret d’octobre de la même année on fixa l’ouverture à onze heures et la clôture à une heure. Les spéculateurs ayant inquiété par leur jeu le Gouvernement, et les louis d’or étant montés à 3.950 francs-assi-