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demeure esclave ils ne seront point transmis à l’admiration ou à l’horreur de la postérité.

Eh quoi ! l’ambitieuse tourbe démagogique, au milieu de la tempête révolutionnaire, ne s’est-elle pas créé un langage fait pour tromper et séduire la multitude ? J’ai entendu crier à mon oreille : « Que les Français périssent, pourvu que la liberté triomphe ! » J’en ai entendu un autre s’écrier dans une section, et je l’atteste : « Oui, je prendrais ma tête par les cheveux, je la couperais, et l’offrant au despote je lui dirais : « Tyran, voici l’action d’un homme libre ! » Ce sublime de l’extravagance était composé pour les classes populacières ; il a été entendu, il a réussi : et nous, nous ne ferions pas une langue, pour transmettre à nos derniers neveux ces incroyables phénomènes moraux et politiques, qui ont frappé d’une longue surprise et nos regards et notre entendement ?

On a parlé diversement dans le monde, de mon Tableau de Paris, J’ai eu du plaisir à l’écrire ; j’ai cherché la vérité avant tout ; voilà toute ma réponse.

Mais, tandis que j’écrivais et que l’on imprimait, le tableau changeait déjà de face ; le luxe sortait plus brillant que jamais de ses décombres fumants. La culture des beaux-arts reprenait tout son lustre, et les lettres, quoiqu’on en dise, n’ont souffert qu’une éclipse passagère.

Comme Paris est une ville essentiellement commerçante, essentiellement industrielle, essentiellement aubergiste, on dirait que pour elle le malheur qui n’est plus n’a jamais existé.

Le moment présent fait donc déjà un étonnant et parfait contraste avec celui de la servitude, de la terreur, du déchirement des familles, du sang et des pleurs.

Puisse le Nouveau Paris jouir du même succès que l’ancien Tableau de Paris ! mais les touches, hélas ! sont bien différentes, vu que le modèle et le peintre