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BOISSY-D’ANGLAS



Surnommé Boissy-Famine. Il fut maître-d’hôtel du frère du roi, pensionnaire de la cour ; il me semblait, quand il parlait, tenir toujours la serviette sous le bras, ainsi que je voyais à Pastoret sa robe parlementaire qui lui tombait jusqu’aux talons.

On ne sait pas encore si ce Boissy-d’Anglas n’était pas d’accord avec les assassins de Féraud, quand il parut impassible en saluant la tête sanglante qu’on lui offrait ; les coups de carabine percèrent les planches à quatre pieds de lui. Fidèle au plan de la réaction royale, il batailla pour elle jusqu’au 18 fructidor, terme de son rôle.

Il avait signé la protestation des soixante-treize. Tout étonné d’avoir fait un acte de courage, ou plutôt ayant peur, il supplia pour effacer sa signature. Cette grâce lui fut accordée par le mépris.

L’idée d’organiser une famine n’était pas neuve ; la cour en avait quelquefois usé ; durant l’été de l’an III Boissy-d’Anglas mentit comme un Barrère, et favorisa, comme un des agents les plus actifs de la faction des Anglomanes, cette disette désespérante, au moyen de laquelle on comptait conduire un peuple affamé à demander un roi.

En récompense du long jeûne qu’il avait éprouvé, le peuple de Paris le renomma député, et son nom était le premier dans les listes qui furent envoyées dans les départements. Quand je dis le peuple de Paris, je veux parler de ces sections qui semblent d’accord avec le cabinet de St.-James, tant elles sont opposées au génie de cette liberté qui enfanta tant de prodiges.

À ce Boissy-d’Anglas était lié cet exécrable Aubry, le plus lâche, le plus mince des hommes, et qui se croyait déjà un second Monk, mais qui sans talent, sans esprit, n’ayant pas même l’audace momentanée du conspirateur, obtint