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la Révolution pouvait arriver ce jour-là, mais les Parisiens en masse s’embarrassaient peu du Parlement ; ils ne se soulevèrent, comme je le prouverai dans la suite, que parce qu’à l’instant de l’audacieuse et absurde manœuvre du 11 juillet et du 12 suivant, les uns tremblèrent pour leur argent, et les autres pour leur vie ; j’étais de ces derniers, et je puis attester que je ne respirais plus que pour ma défense personnelle contre les troupes de la cour. Si Versailles n’eût pas menacé Paris de la manière la plus évidemment hostile, Paris serait encore tranquille. Mais jusques aux poètes et aux écrivains, tout prit les armes alors, parce que l’étrange caracole du prince Lambesc, que je ne cesserai d’appeler un bon patriote, acheva de jeter la consternation de toutes parts, et, bientôt, il n’y eut qu’un cri immense dans tous les quartiers, et ce cri appelait la vengeance.

Je suis donc fondé à dire qu’il ne faut point chercher les causes de la Révolution dans des faits éloignés. Ce fut la vue des canons et tout cet appareil de guerre, ce fut un coup de sabre sur la tête chauve d’un vieillard, ce fut l’heureuse impertinence du prince de pénétrer dans les Tuileries, un jour de dimanche, et de les violer à la tête de sa troupe à cheval, qui fut comme le signal du désespoir et qui électrisa toutes les têtes au point qu’une pareille commotion étonna jusqu’à ceux qu’elle emporta. Une pareille insurrection ne se combine point : elle peut arriver chez le peuple le plus paisible. Le Parisien ne songeait point à dévorer Versailles ; c’est Versailles qui a forcé Paris à le dévorer.


FABRE D’ÉGLANTINE



Les monstres se dévorent entre eux ; ils se sont armés les uns contre les autres du fer dont ils frappaient l’innocence ; ils se sont fait justice. L’humanité et la liberté n’avaient pas de larmes à répandre sur leur anéantissement.