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le second s’est fait, sous le nom de Paul premier, empereur des Russies.

Mais il y en a un plus sage et plus heureux ; il s’est fait cordonnier pour femmes à Hambourg.


Legendre (de Paris) — Lors du procès de Louis XVI, il s’avisa de dire : Voilà bien des formules, des lenteurs ; qu’on le mettre à mort, qu’on le coupe en 83 morceaux, et qu’on l’envoye ainsi aux quatre-vingt-trois départements. Il crut avoir touché le sublime de l’éloquence Montagnarde : il fut accueilli d’un grand éclat de rire. J’étais à côté de lui lorsqu’il proféra ces paroles, et je me disais : Elles vont faire horreur, et l’on attribuera à tous les membres de la Convention la bêtise d’un seul homme auquel on ne peut fermer la bouche. Par quelle fatalité me trouvé-je assis à côté d’un Legendre et d’un Laurent Lecointre ! Ils parlent de liberté et ils ne savent pas lire !

Legendre était brutal, non parce qu’il était boucher, mais parce qu’il avait cru que la brutalité entrait dans la composition d’un républicain, et celui-là n’était pas républicain, qui ne mugissait pas comme un taureau, et qui ne faisait pas des gestes comme pour assommer un bœuf. Il ne pouvait parler ou gesticuler autrement. Les violences de ce Legendre ont été telles, qu’il voulut plusieurs fois frapper Lanjuinais et le jeter en bas de la tribune.

Après la rentrée des 73, nous demandâmes, dans une Assemblée particulière, le rappel des vingt-deux mis hors de la loi. Je portai la parole : Legendre s’y opposa et dit : Je mourrai plutôt à la tribune ; eh bien ! lui dis-je, tu y mourras !

Il se tut, ainsi que sa clique infernale, et les vingt-deux furent rappelés, c’est-à-dire, ceux qui existaient encore ; et tous ces hommes vertueux ont abattu peu à peu le monstre anarchique. Ce fut Legendre qui dénonça Condorcet, en l’accusant faussement d’avoir cherché à soulever le département de l’Aisne.