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pour servir de prétexte à des mesures atroces, dites acerbes, c’étaient les Tape-durs qui étaient chargés du soin de les faire naître.

Ils marchaient tête levée, la menace à la bouche avec des physionomies d’assassins ; ils ne vantaient que les membres les plus exagérés de la société jacobite, désignaient tous les autres à l’échafaud. C’était une douleur pour l’homme juste que de voir passer ces misérables qui allaient par bandes. On baissait les yeux devant leurs regards farouches ; ils ne parlaient que d’arrestation et de faire périr les suspects.

L’insolence de ces scélérats marquait le complément de l’extravagance et de la barbarie des hommes. C’était en les voyant et en les écoutant que l’on ajoutait foi au système d’extermination, tant leurs paroles étaient infernales ; et fabricateurs de tant de forfaits, ils se disaient les patriotes par excellence, les amis de la liberté et de la justice, les véritables fondateurs de la République. Quelle République, bon Dieu ! que celle qui, assise sur des cadavres, des tombeaux et des débris, ne devait avoir pour chefs et pour sujets que des athées, des voleurs et des assassins !

Un pareil régiment semblerait incroyable à ceux qui, éloignés des événements, sont disposés à croire que l’on charge le tableau. Non, il ne l’est pas ; mais il est doux de retracer la mémoire de ces faits horribles, lorsqu’un gouvernement légal est assis sur ses bases, et que par sa force et son autorité, l’humanité et la raison semblent être rentrées enfin dans leurs droits.

Lors de la réaction de Prairial, le royalisme qui se mit en pantalons et en sabots, prit à sa solde ces Tape-durs : on les vit changer de langage, mais non de férocité.