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qu’ils ont fait égorger, n’ont obtenu pour vengeance que l’exil de leurs bourreaux[1] : c’est ainsi que le gouvernement a passé rapidement de la plus odieuse tyrannie à l’indulgence la plus funeste. Après le 9 thermidor, il a transigé avec les assassins : les conjurations, depuis le 9 thermidor, ont été le fruit de je ne sais quelle crainte, ou plutôt, de je ne sais quel délire qui s’était emparé de toutes les têtes. La réaction royale vint parce qu’on avait proposé de porter une loi qui abolissait la peine de mort, loi qui supposait déjà une constitution éprouvée, un gouvernement assis sur des bases solides, un caractère national prononcé ; et nous n’avions pas même les éléments de tout cela.

Robespierre et sa faction avaient fait un pacte avec Philippe d’Orléans ; ils lui avaient dit : Tu nous donneras ton or, en échange de nos forfaits. Louvet, le courageux Louvet avait dénoncé cette faction infernale[2]. L’artificieux Barrère détourna le coup qu’allait porter la Convention. Que d’attentats on eût prévenus par cet acte de justice !

Opposez au supplice de Robespierre celui de la comtesse Dubarry. À quoi servait l’égorgement de cette femme punie par des vaudevilles, et tombée dans le mépris. Si on l’avait vue sortant nue de son lit, du lit de son royal amant, se faisant donner une de ses pantoufles par le nonce du pape, et l’autre par le grand aumônier de France, était-ce un motif pour l’envoyer à l’échafaud ? ou plutôt, avait-on envie de sa belle maison de Lucienne[3] ? Les brigands n’eurent souvent d’autre politique que la soif de l’or ; et quand Robespierre fut un monstre sanguinaire, il faut ajouter qu’il fut un être cupide, qu’il se vendit à d’Orléans, et par suite à l’Angleterre.

  1. Collot d’Herbois, exilé à la Guyane, mourut à l’hôpital de Cayenne le 8 janvier 1796. Billaud mourut à Saint-Domingue après avoir été déporté à la Guyane.
  2. Voir chap. : Massacres de Septembre.
  3. Louveciennes.