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RENVERSEMENT DU CULTE CATHOLIQUE



L’année précédente on avait vu encore les processions du St-Sacrement, à la Fête-Dieu, se faire avec la pompe accoutumée. Dieu avait été escorté par les mandataires de la nation. Rien n’annonçait une destruction subite. Le peuple en général semblait être attaché aux cérémonies du catholicisme : mais il y a des corps frappés de la foudre, et qui semblent encore conserver la vie ; on les touche, ils tombent en poussière.

Le peuple avait l’apparence de croire à la messe, à la présence réelle, aux dogmes les plus reçus ; il n’y croyait pas. Tous les sarcasmes de Voltaire contre les prêtres, toutes les plaisanteries de l’auteur de la Pucelle étaient venus jusqu’à lui. La conduite des évêques qui étaient sous ses yeux, les mœurs des ecclésiastiques, les richesses du clergé, cette espèce de veau gras qu’on cherchait à immoler depuis longtemps, la licence des idées et des actions tout avait amené le terme d’un culte qui portait un caractère d’idolâtrie que la raison réprouve, et qui ne se soutenait plus que par un certain éclat.

Il n’y avait plus qu’un pas à faire pour porter la hache révolutionnaire sur les autels chargés d’or et d’argent ; nus, ils auraient pu échapper à la main destructrice.

Ce n’est point le renversement qui doit étonner, mais c’est de les avoir vus tomber en un jour avec tous les accessoires de la haine ou du mépris le plus profond.

Les progrès de l’irréligion furent donc très rapides parmi cette plèbe qui s’arma tout à coup de leviers et de marteaux pour briser les effigies sacrées devant lesquelles elle ployait le genou six mois auparavant. On lui persuada sans peine qu’il lui était utile de transformer les temples en magasins, les calices et les croix de vermeil en monnaie, les