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de chasser aux esclaves marrons, en furent cette fois pour leurs frais ; Titia resta introuvable. On finit par croire qu’elle avait réussi à gagner quelque ville libre de l’Ouest ou du Nord.

À l’époque où nous en sommes de notre récit, il n’était plus question de Titia. On était en septembre. La chaleur qui avait été comparativement peu forte en été, menaçait de prendre sa revanche en automne ; elle n’avait cessé de croître depuis le commencement du mois. Le 20, elle fut insupportable. La journée eut un caractère particulier ; elle se composa alternativement de calmes-plats étouffants, et de bouffées de vent, qui, rasant le sol en différents sens, montaient tout à coup en spirales et soulevaient des tourbillons de poussière. Il semblait aux personnes obligées de sortir qu’elles respiraient, non de l’air, mais de la cendre chaude. Dans les maisons, on avait un poids sur la poitrine, et toute la surface du corps était tourmentée de picotements accompagnés d’une sensation de brûlure. On était impatient, agacé.

Après le coucher du soleil, une teinte d’un rouge sombre et d’un éclat métallique envahit le ciel, et persista jusque dans la soirée. Des nuages d’un gris noirâtre, ceux-ci petits, ceux-là énormes, tous déchiquetés sur leurs bords, commencèrent, à la tombée de la nuit, à passer lentement, séparés les uns des autres par des intervalles plus ou moins grands, semblables aux lambeaux d’une immense toile déchirée par le vent. Ils étaient à une hauteur peu considérable, et s’acheminaient vers le nord-ouest.

Vers onze heurs, le vent tomba ; les nuages cessèrent de passer, les étoiles brillèrent.

Pélasge passait la soirée chez Vieumaite. Ils étaient dans l’observatoire.

« Le ciel semble se nettoyer, dit Pélasge.

« Ne nous fions pas à cette accalmie, répondit le vieillard ; la chaleur continue, le baromètre est très bas, et voyez comme la boussole est agitée de petits mouvements convulsifs. Remarquez-vous que les étoiles, dans la partie sud-est du ciel, scintillent plus vivement qu’ailleurs ? j’ai