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« Ah ! expliquez-moi cela, Mademoiselle, s’il vous plaît.

« Il est si brigand, Monsieur ! il n’aime que les exercices violents et dangereux. Ma mère tremble quand il est dehors ; il lui semble toujours qu’on va le ramener à la maison avec un membre cassé. Mais, il est adroit comme un singe ; il ne lui arrive jamais malheur. Il est toujours si impatient de courir au grand air, que je fais une partie de ses devoirs pour lui.

« Vous, Mademoiselle ? vous apprenez donc aussi le grec et le latin ?

« Oui, Monsieur, c’est moi-même qui l’ai demandé, pour aider mon frère.

« C’est très gentil de votre parte, Mademoiselle.

« Monsieur, il apprend très bien avec moi, quand il est tranquille ; mais il est d’un caractère si turbulent ! c’est terrible. »

Pélasge demeura un instant silencieux ; il réfléchissait sur ces paroles de Chant-d’Oisel : « Il apprend très bien avec moi, quand il est tranquille. »

« Mademoiselle, reprit-il, dites-moi, je vous prie : votre frère aime-t-il son professeur ?

« Pas trop.

« Pourquoi ?

« Parce que Monsieur Héhé l’humilie en l’appelant tête dure, esprit bouché.

« C’est Monsieur Héhé que se nomme son maître ? demanda Pélasge d’un air étonné.

La fillette se mit à rire, et elle le fit de si bon cœur que sa gaîté se communiqua à son interlocuteur.

« Ce nom est encore une invention de mon grand-père, dit-elle ; il aime à donner des sobriquets, il ne vivrait pas sans cela. Le professeur de mon frère a un tic ; à chaque trois ou quatre phrases qu’il prononce, il ricane en disant héhé. C’est déplaisant ; il a toujours l’air de se moquer de vous. En parlant de lui, mon grand-père ne dit jamais que Monsieur Héhé : insensiblement tout le mond, à la maison, excepté cousine Pulchérie, a pris l’habitude de dire Monsieur Héhé. Son vrai nom est MacNara. »