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« Non, pas du tout, répondit Démon ; au contraire, j’ai confiance.

« À la bonne heure.

« Mais je puis me tromper ; le sort est si perfide !

« Tâchez de bien dormir, reprit Pélasge, afin que demain vous soyez dans de bonnes conditions physiques.

« Oh ! sous le rapport du sommeil, répondit Démon en souriant, vous savez que la nature m’a bien doué. La certitude d’être tué à mon lever, ne m’empêcherait pas de dormir. Je compte sur vous pour me réveiller à cinq heures. »

Pendant que Démon causait avec Pélasge, M. Héhé était près de Mlle Pulchérie. Il n’avait pas de secrets pour elle. Il lui raconta toute l’affaire de Démon avec M. des Assins, lui recommandant toutefois la plus grande discrétion.

« Si l’on venait à savoir, remarqua-t-il, que la lettre que je vous ai donné à lire est la cause première de ce qui arrive, cela ferait un mauvais effet. »

À peine M. Héhé était-il parti, pour rejoindre Pélasge et Démon, que Mlle Pulchérie, oubliant la recommandation de son ami pour satisfaire sa propre méchanceté, entrait dans la chambre de Blanchette et l’accablait de reproches, comme coupable de la prochaine et inévitable mort de Démon. Elle eut la cruauté de lui révéler le secret de sa naissance ; elle alla jusqu’à lui dire que si l’esclavage existait encore, on la mettrait à sa vraie place, et qu’elle serait fouettée jusqu’au sang, comme elle le méritait, pour avoir amené un duel entre le dernier rejeton des Saint-Ybars et un homme qui tuait toujours son adversaire.

Blanchette était éperdue de désespoir et de terreur. En moins de quelques minutes, elle venait de recevoir des chocs dont un seul eût suffi pour l’accabler. Sa raison chancela ; elle se demanda si elle était bien Blanchette, si la petite Blanchette n’était pas un rêve, ou une pensée que Chant-d’Oisel aurait laissée derrière elle et oubliée dans la vie. Le rire sarcastique de Mlle Pulchérie la ramena au sentiment de son existence ; elle recula d’horreur, et joignant les mains :