Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/121

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui lui est due. Soit. Il m’en coûte beaucoup, je ne te le cache pas, de mentir même dans un but honorable ; rappelle-toi qu’en le faisant je vous donne, à toi et à ta famille, la plus grande preuve d’affection que tu puisses me demander. Va, fais dire à Mlle Nogolka que je désire lui parler. »

Dans l’après-midi une voiture s’arrêtait devant la maison de Vieumaite, et Nogolka en descendait. Vieumaite la reçut au salon.

« Mademoiselle, dit-il, je n’ai pas besoin de vous répéter combien je vous estime et vous suis attaché ; vous le savez bien, n’est-ce pas ? mais il importe de vous dire que mon respect et mon affection pour vous, ont grandi depuis que je sais tout. Oui, Mademoiselle, mon malheureux fils m’a tout confessé. Il est bien à plaindre, ne le haïssez pas. Il reconnaît qu’il commet un acte de tyrannie, en vous privant de votre liberté ; reprenez-la, Mademoiselle. Vous désirez partir ; cela est juste, cela est nécessaire ; je vous approuve entièrement. La perte sera grande pour Chant-d’Oisel ; heureusement M. Pélasge voudra bien, je pense, vous remplacer pour la partie littéraire. Pour ce qui est de la musique, nous prierons nos amis de la Nouvelle-Orléans de nous aider dans la difficile tâche de trouver une personne possédant cet art à fond comme vous et sachant l’enseigner avec autant d’habileté.

« Vous m’avez toujours montré une affection vraiment filiale ; à mon tour, je tiens à vous donner une dernière preuve de mes sentiments. Prenez ce portefeuille. Il contient une petite fortune. C’est moins une récompense, qu’une rétribution largement méritée par vos cinq années de services aussi dévoués qu’intelligents. Allez, mon enfant ; retournez auprès de vos parents ; soyez heureuse, et pensez quelquefois à moi. »

Nogolka voulut remercier Vieumaite ; il l’interrompit d’un geste bienveillant, et lui baisa paternellement le front. Elle était atterrée : la perspective du départ de Pélasge l’avait tant fait souffrir, et c’était elle qui allait partir ! Elle était toute tremblante en remontant en voiture. Elle