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question, dignes d’un tribunal d’inquisiteurs, & vos supplices affreux faits pour un peuple de Cannibales. Nous ne mettons plus à mort le voleur, parce que c’est une injustice inhumaine de tuer celui qui n’a point donné la mort : tout l’or de la terre ne vaut pas la vie d’un homme ; nous le punissons par la perte de sa liberté. Le sang coule rarement, mais lorsqu’on est forcé de le verser pour l’effroi des scélérats, c’est avec le plus grand appareil. Par exemple, il n’y a pas de grace pour un ministre[1] qui abuse de la confiance du souverain, & qui se sert contre le peuple du pouvoir qui lui est confié. Mais le criminel ne languit point dans les cachots : la punition suit le forfait ; & si quelque doute s’élève, on aime mieux lui faire grace que de courir le risque horrible de retenir plus longtems un innocent.

Le coupable qu’on arrête est enchaîné publiquement. On peut le voir, parce qu’il doit être un exemple visible & éclatant de

  1. La bonne farce à représenter que le tableau de nos ministres ! Celui-ci entre dans le ministère à l’aide de quelques vers galant ; celui-là, après avoir fait allumer des lanternes passe aux vaisseaux, & croit que les vaisseaux se font comme des lanternes : un autre, lorsque son père tient encore l’aune, gouverne les finances, &c. Il sembleroit qu’il y ait une gageure pour mettre à la tête des affaires des gens qui n’y entendent rien.