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QUATRE CENT QUARANTE.

fois, comme l’a dit un bon plaisant, la Médecine sur le point d’appeller la Chirurgie à son secours.

— Tout est changé aujourd’hui : amies & non rivales, elles ne forment plus qu’un corps ; elles se prêtent un secours mutuel, & leurs opérations ainsi réunies tiennent quelquefois du miracle. Le médecin ne rougit pas de pratiquer lui-même les opérations qu’il juge convenables, quand il ordonne quelques remèdes, il ne laisse pas à un subalterne le soin de les apprêter, tandis que la négligence ou l’impéritie de son ministre peuvent les rendre mortels ; il juge par ses propres yeux de la qualité, de la dose, & de la préparation : choses importantes, & d’où dépend rigoureusement la guérison. Un homme souffrant ne voit plus au chevet de son lit trois praticiens qui, comiquement subordonnés l’un à l’autre, se disputent, se mesurent des yeux, & attendent quelque bévue de leurs rivaux pour en rire tout à leur aise. Une médecine n’est plus l’alliage bizarre des principes les plus opposés. L’estomac affoibli du malade ne devient plus l’arène où les poisons du midi accourent combattre les poisons du nord. Les sucs bienfaisans des herbes nées dans notre sol, & appropriées à notre tempérament, dissipent les humeurs, sans déchirer nos entrailles.

Cet art est jugé le premier de tous, parce qu’on en a banni l’esprit de systême & de