Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/340

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sommes vertueux, c’est-à-dire, si nous suivons ses loix. Eh ! mon fils, comment pourrions-nous nous défendre de l’adorer & de le bénir ? » À ces mots la mere & l’enfant se prosternent, & leurs vœux confondus montent ensemble au trône de l’Éternel.

C’est ainsi qu’elle l’environne de l’idée d’un Dieu, qu’elle nourrit son ame du lait de la vérité, & qu’elle se dit : « je remplirai les desseins du créateur qui me l’a confié. Je serai sévère contre les passions funestes qui pourroient nuire à son bonheur. À la tendresse d’une mere j’unirai la vigilance inflexible d’une amie. »

Vous avez vu à quel âge il est initié à la communion des deux infinis. Telle est notre éducation ; elle est toute en sentimens, comme vous le voyez. Nous abhorrons ce bel esprit ricaneur qui étoit le plus terrible fléau de votre siecle : il desséchoit, il brûloit tout ce qu’il touchoit ; ses gentillesses étoient les germes de tous les vices. Mais si le ton frivole est dangereux, qu’est la raison elle-même sans le sentiment ? Un corps décharné, sans coloris, sans graces, & presque sans vie. Que sont des idées neuves & même profondes, si elles n’ont rien de sensible & de vivant ? Qu’ai-je besoin d’une vérité froide qui me glace ? Elle perd sa force & son pouvoir. C’est dans le cœur que la vérité va prendre ses charmes & son tonnerre. Nous chérissons cette éloquence qui abonde