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tendrissant de vos mœurs. Comment avez-vous pu effacer des fléaux qui paroissoient devoir engloutir l’espèce humaine ?

Mon guide prit un ton de voix plus élevé, & s’animant avec noblesse & dignité, dit en levant les yeux vers le ciel : « ô dieu ! si l’homme est malheureux, c’est par sa faute, c’est qu’il s’isole, c’est qu’il se concentre en lui-même. Notre activité se consume sur des objets futiles, & néglige ceux qui pourroient nous enrichir. En destinant l’homme à la société, la providence a mis à côté de nos maux les secours destinés à les soulager. Quelle plus étroite obligation que celle de nous secourir mutuellement ! N’est-ce pas là le vœu général du genre humain ? Pourquoi fut-il si fréquemment trompé ?

Je vous le répete ; nos femmes sont épouses & mères, & de ces deux vertus dérivent toutes les autres. Nos femmes se déshonoreroient, si elles se barbouilloient le visage de rouge, si elles prenoient du tabac, si elles buvoient des liqueurs, si elles veilloient, si elles avoient en bouche des chansons licencieuses, si elles hazardoient la moindre familiarité avec les hommes. Elles ont des armes plus sûres : la douceur, la modestie, les graces simples, & cette décence noble qui est leur partage & leur véritable gloire[1].

  1. Tant que les femmes domineront en France, y