Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le cri de cette populace effrénée que soulevoit ce David ; il a été témoin des fureurs de ce fanatisme absurde ! » Alors je m’enveloppai de mon manteau, je me cachai le visage, & je rougis pour mon siécle.

On annonça pour le lendemain la tragédie de Cromwel, ou la mort de Charles premier[1] ; & toute l’assemblée parut extrêmement satisfaite de cette annonce. On me dit que la piéce étoit un chef-d’œuvre, & que jamais la cause des rois & celle des peuples n’avoient été présentées avec cette force, cette éloquence & cette vérité. Cromwel étoit un vengeur, un héros digne du sceptre qu’il avoit fait tomber d’une main perfide & criminelle envers l’État ; & les rois dont le cœur étoit disposé à quelque injustice, n’avoient pû jamais lire ce drame sans que la pâleur ne vînt blanchir leur front orgueilleux.

On donna pour seconde piéce la partie de chasse de Henri IV. Son nom étoit toujours adoré, & de bons rois n’avoient pu effacer sa mémoire. On ne trouvoit point dans cette piéce que l’homme défigurât le héros ; & le vainqueur de la ligue ne me pa-

  1. À quoi songez-vous, poëtes tragiques ? Vous avez un pareil sujet à traiter, & vous allez me parler des Persans & des Grecs ; vous me donnez des romans rimés : eh ! peignez-moi Cromwel.