Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/135

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans le sein des pauvres : avant de répandre ses bienfaits, il ne s’informe pas si un homme est attaché à ses opinions particulieres ; il distribue des secours à tous les malheureux : il suffit qu’ils soient hommes. Il n’est point entêté, point fanatique, point opiniâtre, point persécuteur ; il n’abuse point d’une autorité sacrée pour se croire au niveau du trône. Son œil est toujours serein, image de cette ame douce, égale & paisible, qui ne met de chaleur & d’activité que dans l’emploi de faire le bien. Il dit souvent à ceux qu’il rencontre : Mes amis, la charité, comme dit st Paul, marche avant la foi. Soyez bienfaisans, & vous aurez accompli la loi. Reprenez votre prochain s’il s’égare, mais sans orgueil, sans aigreur. Ne tourmentez personne au sujet de sa croyance, & gardez-vous de vous préférer dans le fond du cœur à celui que vous voyez commettre une faute, car demain vous serez peut-être plus coupable que lui. Ne prêchez que d’exemple. N’allez point mettre au nombre de vos ennemis un homme qui disposeroit absolument de sa pensée. Le fanatisme dans sa cruelle opiniâtreté, a déja fait trop de mal pour ne pas redouter & prévenir jusqu’à ses moindres apparences. Ce monstre paroit d’abord flatter l’orgueil humain & aggrandir l’ame qui lui donne accès ; mais bientôt il a recours à la ruse, à la perfidie, à la cruauté, il foule aux