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— Je le veux bien, ma petite maman ; mais comme ça te fatiguerait de rester debout devant le lit pour m’écouter, assieds-toi là-dessus ; ma bonne va te donner une chaise pour appuyer tes pieds, et moi je vais m’asseoir sur toi où je me trouve bien plus à mon aise que partout ailleurs : au moins, quand je suis là, je peux t’embrasser tant que je veux. »

Et sautant aussitôt sur mes genoux, après avoir passé son bras droit autour de mon cou, placé sa main gauche, qui lui restait libre, dans ma main droite et m’avoir embrassée au moins vingt fois, elle me dit :

« Dès la première fois que j’ai lu la tragédie du Roi Léar, ma petite maman, j’ai pensé qu’on ne l’avait faite que pour faire entendre aux papas et aux mamans qui veulent donner leurs biens à leurs enfans, qu’ils doivent, avant de le faire, regarder avec attention ce qui est arrivé au roi Léar[1], qui avait tout donné le sien à ses deux vilaines filles aînées… Mais elles n’aimaient donc pas du tout leur papa, qui avait été si bon pour elles, ces deux mauvaises-là ?… Oh ! ma foi, mauvaises est bien le nom qui leur convient,

  1. On pouvait dire, et avec juste raison, qu’Élisa tirait la quintessence de ce qu’elle lisait.