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Je ne suis pas coupable ; il ne l’est pas, oh ! grâce !
Oui, grâce !…

BOABDIL.

                          Épargnez-vous cette inutile audace ;
Vous espérez en vain l’arracher au trépas.

ZORAÏDE.

Mais il est innocent ! grâce !… Il ne me croit pas !
Mon Dieu !

ABENHAMET.

                    Va, plus que nous il se punit lui-même ;
Zoraïde, peux-tu craindre l’arrêt suprême
Qui t’enlève à ce monstre et dégage ta foi ?
Ah ! songe qu’à jamais tu devais être à moi !
Libre du joug affreux d’un parjure hyménée,
Victime, à ton bourreau tu n’es plus enchaînée.
Notre sort s’accomplit ; la mort, brisant nos nœuds,
De l’hymen du tombeau va nous unir tous deux !

BOABDIL.

Insolent, oses-tu devant moi ?

ABENHAMET.

                                                          Qu’ai-je à craindre ?
En marchant au supplice ai-je besoin de feindre ?
Pour la dernière fois je parle en liberté ;
La mort me donne au moins un droit de vérité !
Ah ! quand d’un échafaud la vérité s’élance,
Elle est d’un Dieu vengeur la terrible sentence.
Tremble ! ce Dieu te juge, et t’apprend par ma voix,
Quels arrêts vont porter ses redoutables lois !
Écoute, Boabdil ! l’instant fatal s’avance :
De son faîte orgueilleux va tomber ta puissance.
Te jetant loin de lui, ce trône où tu t’assieds,
Monarque d’un moment, va crouler sous tes pieds.