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ALY.

Qui punit justement ne commet pas un crime.
Et d’un péril certain tu dois sauver l’état.

BOABDIL.

Pourrai-je le sauver par un assassinat ?

ALY.

Oui, tu le peux, te dis-je. À ton peuple indocile
Tu dois une leçon terrible, mais utile.
Tes sujets, qu’a séduits une indigne tribu,
Doivent rapprendre enfin le respect qui t’est dû.
Par des concessions presque toujours fatales,
Ou voit trop s’engager de luttes inégales,
Dans lesquelles, bientôt devenu le plus fort,
Le peuple exigeant tout, s’il suppliait d’abord,
Contre le moindre arrêt son audace impunie,
Prêt à se révolter, crie à la tyrannie.
Appesantis à temps le joug de son devoir,
Ou bien…

BOABDIL.

                  Oui ; de ce trône, où s’assied mon pouvoir,
Je ne descendrai point ! Qu’il résiste ou qu’il tombe,
Je ne ferai qu’un pas de ce trône à ma tombe.
Que de pièges, grand Dieu ! se tendaient à la fois !
Toujours craindre ou punir, est donc le sort des rois !
N’importe ! il faut enfin satisfaire à ma haine ;
Il faut qu’à l’instant même au supplice on les traîne…

ALY.

Non pas !…

BOABDIL.

                    Dans mon courroux qui peut me retenir ?

ALY.

Le tout en punissant est de savoir punir.