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Oubliez à jamais mes triomphes passés :
Du chemin de l’honneur mes pas sont effacés.
Si j’eus quelque valeur, en ce moment, qu’importe !
Je dois mourir aussi, puisque ma gloire est morte !
Boabdil, devant toi, je courbe ici mon front ;
Sur lui, de mon pays tu dois venger l’affront,
Sans chercher si je suis ou coupable ou victime,
Si je dois expier mon malheur ou mon crime.
C’est à moi de subir les rigueurs de mon sort ;
C’est à toi d’être juste et d’ordonner ma mort.

BOABDIL.

Proscrite par la loi, ta tête criminelle
Doit tomber sous le fer ; mais, moins sévère qu’elle,
Ma volonté, placée au-dessus de la loi,
Va seule prononcer : écoute, et soumets-toi.
Que la honte, l’oubli sur ta tête retombe !
Va chercher dans l’exil un asile, une tombe.
Rejeté loin de lui, ton pays désormais,
Comme un de ses enfans te renonce à jamais.
Ce jour seul dans ces murs à tes pas reste encore ;
Mais avant le retour de la prochaine aurore,
Pars ! Tel est ton destin, et mon arrêt.

ABENHAMET.

                                                                      Oh ! ciel !
Moi vivre, moi subir un opprobre éternel !
Lorsque je dois mourir, pourquoi changer ma peine ?
Une telle clémence est injuste, inhumaine.
Ah ! mille fois la mort, plutôt que la faveur
Qui réserve ma tête au joug du déshonneur !
Appelle tes bourreaux !

BOABDIL, s’emportant.

                                            Audacieux esclave !
D’où te vient cet orgueil qui m’insulte et me brave ?