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tardai pas à reconnaître le tort que j’avais eu de la laisser dans sa croyance ; car, le lendemain, lorsque l’obscurité revint, elle me dit : « Il parait que le bon Dieu est encore malade ; M. Aublanc ne sera point allé le voir. » Et elle soupira… Je compris alors combien il est imprudent de tromper un enfant, puisque l’imagination, à sa naissance, est comme une cire molle où tout ce qui la touche y laisse son empreinte. Il me suffira, pour le prouver, de citer le fait suivant :

Ainsi que tous les petits enfans, Élisa dormait le jour ; c’était ordinairement depuis midi jusqu’à deux heures. Un jour qu’au lieu d’employer, comme de coutume, son temps à dormir, elle le passait à jaser avec moi, à me faire mille questions qui toutes tendaient à l’instruire [1], je pensai qu’en ne voyant plus le jour elle s’endormirait, et je fermai bien doucement les contre-vents de la croisée près de laquelle je travaillais ; c’était la seule qu’il y eût dans la chambre. Surprise de se trouver tout à coup dans l’obscurité, Élisa m’en demanda la raison. Je lui dis qu’à force de parler elle avait

  1. Élisa eut toujours un tel désir de s’instruire que je crois que la pauvre petite en sentit le besoin presque aussitôt que la vie.