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Ah ! qu’importe l’asile où repose ma tête !
Qu’importe que je rampe, ou je touche le faîte.
De la mort quand l’airain dit l’instant solennel,
Hélas ! soit un peu plus, soit un peu moins d’espace,
On a pour sommeiller toujours assez de place ;
Qu’importe où vont dormir les restes d’un mortel !

Sans espoir d’un regret je m’éteindrai peut-être !
On osera gémir quand j’aurai cessé d’être :
Une larme s’accorde à qui laisse de l’or…
J’ai déployé ma voile au souffle de la bise :
Eh ! que faire aujourd’hui quand le prisme se brise ?
Maintenant près de moi que regarder encor ?

Voir le monde encenser, renverser un idole ;
Pour prix de ses accens mendier une obole ;
Passer comme dans l’ombre, et sans être entendu ;
Voir lancer l’anathème à tout homme qui pense ;
Et, sur son front empreint du sceau de l’indigence,
Voir un glaive toujours s’agiter suspendu !…

Que ce glaive, s’il faut, m’épargne ou me déchire !
Mais que jamais, captif, je n’attache ma lyre
Au char de la faveur emporté loin de moi.
Quel que soit le destin, je le souffre et le brave !
Avec des chaînes d’or en est-on moins esclave ?
Anathème plutôt à qui n’ose être soi !