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La flûte du pasteur jette sa note égale,
Et l’éternel écho mollement la redit.

Ah ! coule en vain pour moi, fleuve calme et funeste ;
Laisse-moi sur tes bords un aspect d’ici-bas,
Et l’amour et la gloire ; et que, parfum céleste,
Ils embaument tes flots, mais ne s’y plongent pas.

Mon regard fatigué d’une trop douce image,
Sous un ciel orageux aime un soleil voilé ;
Il aime, dans la nuit, quand un obscur nuage
S’épaissit un moment sous le dôme étoilé.

Le cœur prête souvent un charme à la souffrance ;
Le printemps est plus doux après un long hiver…
Mais ne voir aujourd’hui que ce qu’on vit hier ?
Mais n’avoir plus besoin d’écouter l’espérance ?…

Lorsqu’en mon sein gonflé par un dernier soupir
Le flambeau de la vie aura perdu sa flamme,
Dans ton cours oublieux n’abîme point mon âme,
Léthé, que sur tes flots surnage un souvenir.


(Mars 1837.)