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mécontente, la fortune nous devint si contraire que nous nous trouvâmes tout à coup plongées dans une situation affreuse. Si j’avais dû souffrir seule de ce malheur, loin de murmurer, j’en aurais béni le ciel, puisqu’on me faisant connaître tout ce que j’étais en droit d’attendre du sublime et tendre dévouement de mon Élisa, il me dévoilait toutes les nobles vertus que renfermait sa belle âme. Mais, je l’espère, Dieu dut pardonner la plainte poussée par le cœur d’une mère que la pensée de voir la misère peser sur sa fille chérie révoltait, comme il doit me pardonner les gémissemens que m’arrache une séparation à laquelle je ne puis m’habituer. J’ai pensé que rien ne pourrait mieux donner l’idée du caractère d’Élisa qu’une lettre qu’elle écrivit a l’époque dont je parle :

« Vous m’avez fait promettre tant de fois, madame, que s’il me prenait jamais envie de me mettre à donner des leçons, de vous en avertir, que vous me donneriez mesdemoiselles Berthe et Julie pour écolières, que je m’empresse de

    pas douze ans, et à cet âge on n’est pas poète. » Je lui conseillai de retoucher ses vers ; mais elle me répondit qu’elle s’en garderait bien, qu’elle voulait les conserver avec toutes leurs imperfections.