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« O Landgrave, seigneur des forêts, qui te venges,
Par un homme pendu, d’un cerf pris dans ton bois ;
Seigneur de la cité, qui voles les bourgeois ;
Seigneur des champs féconds, de qui les mains avides
Font que le manant pleure auprès des granges vides ;
Toi qui, le soir, sortant de ton nid de vautour,
T’embusques, pour piller les marchands, au détour
Des chemins, et t’en vas sans laver tes mains rouges ;
Prince que l’on redoute, au point que, quand tu bouges,
Tout s’ébranle de peur autour de tes desseins ;
Tortureur des vivants, blasphémateur des saints ;
Oh ! ton âme de fer, Landgrave, que n’est-elle
Le fer docile et chaud que mon marteau martèle ! »
Ainsi, sans plus songer qu’un autre homme était là,
L’étrange forgeron, forgeant toujours, parla
Jusqu’à l’heure où, luisant sous l’aube reparue,
Le fer qu’il martelait fut un soc de charrue.

Le Landgrave rentra dans son château, pensif.

« Le père sous un chêne et l’enfant sous un if
Attendent, Monseigneur, qu’on avise à les pendre.

— Ils ont leur grâce, vas ! et, de plus, fais-leur rendre