Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
MÉPHISTOPHÉLA

que le produit de ses vols quotidiens, éprouvait quelques transes. Si elles le lâchaient, ses amies ? ce serait donc sans avantage pour lui-même qu’il les aurait aidées à tirer les marrons du feu ? Mais il se taisait, attendant. D’un commun accord, on se rendait à Paris. Ce fut là seulement qu’ils débattirent cette question grave : l’attribution équitable des bénéfices. Les deux femmes tombèrent vite d’accord : « Part à deux », dirent-elles presque en même temps ; il fut convenu que la fortune totale, réalisée en espèces, serait divisée en moitiés dont l’une appartiendrait à Phédo, l’autre à Mme Sylvanie ; puis la tante et la nièce s’en iraient chacune de son côté, où elles voudraient. Maintenant elles avaient une hâte de se quitter. Désir naturel à ceux qui firent ensemble quelque mauvais coup. Il leur semble que la gêne du crime commis diminue par la disparition de l’un des coupables, et, un complice absent, c’est une part d’innocence retrouvée. « Très bien ! mais moi ? demanda Luberti. — Toi, dit Phédo, tu n’es pas le plus malheureux, tu m’épouseras. — Hein ? — Oui, si ma tante n’est pas jalouse ». Il n’y avait, dans les paroles de Phédo, aucune intention de plaisanterie. Riche maintenant, elle aspirait à être honorable : il fallait un père à l’enfant qui allait naître ; et, à cet em-