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MÉPHISTOPHÉLA

de quoi écrire, traça quelques lignes, ferma l’enveloppe, puis, après ces mots à l’hôtesse : « Je reviens dans un instant, » elle fit signe à sa fille de la suivre, et sortit. Tout ceci s’accomplissait sans hâte ni lenteur, avec une précision de rite. Elles commencèrent de monter une route ensoleillée et fleurie de fleurs tombées, entre une double file d’acacias remués par la brise ; au sommet s’élevait une maison de briques roses, à la façade escaladée de vignes folles et de lierres grimpants.

Sophor fit halte à mi-côte. Elle dit à Carola :

— Vous voyez cette habitation, là-haut ? C’est là que vous allez, c’est là que vous vivrez, avec votre père. Voici une lettre pour lui.

— Oh ! maman ? dit Carola en tendant les mains.

— Non, je ne peux pas vous suivre. Adieu.

— Mais, maman, toute seule…

— Soyez sans crainte ; il n’y a personne sur la route ; et, dans cette maison, vous serez bien reçue. Allez, je le veux.

Elle n’avait pas levé sa voilette. Elle parlait comme de très loin à travers la dentelle obscure. L’enfant courba le front, prit la lettre, continua de monter la côte. Sophor, sans mouvement, toute sombre au milieu de la gaieté de la matinée et des