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MÉPHISTOPHÉLA

de Carola, la regarda dans les yeux, cherchant une flamme où quelque chose en elle s’allumerait ! La pensionnaire était bien troublée ; ne savait que dire ni que faire ; se tournait vers la rue, balbutiait des mots qu’elle-même n’entendait pas. Voir sa mère, ainsi, tout à coup, quand on ne l’a jamais vue ; quitter le couvent pour aller elle ignorait où, avec une personne inconnue, c’était effrayant ! Mais aussi c’était très doux d’avoir une maman, qui se montre enfin, qui vous emmène… Tout à coup, elle pencha sa tête vers l’épaule de Sophor, et elle avait de courts sanglots qui ressemblaient à de petits cris de joie. Puis elle se mit à bavarder, fillette, en pleurant de plaisir. Ah ! qu’elle était contente ! elle avait bien cru que tout était fini pour elle ; qu’on ne la tirerait jamais de ce cloître où on était très bon pour elle, mais où elle s’ennuyait tant. Alors, vraiment, elle serait comme les autres demoiselles ? elle ne ressemblerait plus aux orphelines, aux abandonnées ? Comme ce doit être bon de ne pas être seule ! « Maman ! maman ! » Et son père, est-ce qu’elle le verrait aussi ? oui ? bientôt ? quel bonheur ! Mais elle disait surtout : « maman ». Ce mot qu’elle n’avait jamais dit, lui paraissait si charmant à prononcer qu’elle le répétait à tout