Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/456

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
446
MÉPHISTOPHÉLA

dans la continuation de l’effort vers la joie, la joie accoutumée ; ce furent des heures délirantes : toutes les violences des désirs anciens, avec toutes les sciences acquises en de longues perversités, elle les fit tenir, du crépuscule à l’aube, en ses caresses. Jamais encore elle n’avait, avec tant de subtils acharnements que récompensaient des soupirs, obligé son amie à l’aveu de l’heureuse mort ; elle connut une fois de plus, — volontairement, hélas ! — la victorieuse extase qu’elle avait si souvent due à la précipitation de tout son être dans la féminilité béante ; et, se redressant, glorieusement déchevelée, elle arborait l’arrogance dont elle se divinisa sur l’autel parmi l’universelle multitude des vierges et des veuves.

Durant des semaines et des mois, elle s’obstina au plaisir, frénétiquement.

Mais elle sentait bien qu’il avait cessé d’être réel, ce plaisir ; qu’elle se mentait à elle-même, qu’elle voulait maintenant ce qu’elle avait désiré, que son instinct ne se rallumait qu’à l’orgueil ancien de s’être satisfait. Cette épouvante par instants la traversait, qu’elle avait fini d’être elle-même. Elle chassa vite cette importune crainte ! C’était absurde d’imaginer qu’elle aimait moins, qu’elle convoitait avec moins de