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MÉPHISTOPHÉLA

les hasards d’un bavardage on prononçait le nom de Mme d’Hermelinge, ou qu’elle le lisait dans un journal à propos d’une première représentation, elle devenait tout à coup immobile, avec les yeux fixes et un sourire d’extase sur ses pâles lèvres flétries, ainsi que devant une apparition. Il lui semblait que si elle pouvait se trouver en présence de Sophor, ne fût-ce qu’une minute, tous ses malheurs seraient finis ; un regard de son amie la referait jeune, jolie, joyeuse comme autrefois, toute consolée. Elle avait cette idée fixe, ainsi qu’une petite fille a confiance en une fée. Pensait-elle que Sophor lui viendrait en aide, la tirerait d’embarras ? oui, peut-être, elle entrevoyait quelque chose de ressemblant à une amicale aumône. Sophor était si riche ! elle était si pauvre, elle, Magalo ! Mais cette espérance se précisait peu. Mme d’Hermelinge, c’était pour elle, d’une façon générale, la paix, le salut, la vie ; de l’entendre, elle serait contente au point qu’elle se mettrait à danser comme une folle. Hélas ! à présent, c’était bien plus impossible que naguère, d’aller chez Sophor ! Vieille, enlaidie, vêtue de loques, l’air d’une marchande de chansons, elle n’aurait jamais le courage d’entrer dans le somptueux hôtel. Ah ! non, elle avait trop honte d’elle-même. Une fois, pourtant,