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MÉPHISTOPHÉLA

c’était alors la mode d’y aller ; mais la mer ondulait si calme qu’il semblait n’y avoir aucun péril à se confier à elle. Sophor, accrochée d’une main à l’échelle, Marfa, plus loin dans la profondeur claire, se baignaient nonchalamment. Leurs blancheurs, en l’azur de l’onde, semé d’étoiles, étaient délicieuses et s’épanouissaient comme pâmées sous la caresse de la nuit. Sophor regardait Marfa qui, hardie, fluait entre le flot avec des souplesses de petite sirène. Et, de la voir vêtue de transparence, son désir s’allumait plus ardemment, sollicité par les étreintes partout de l’eau qui enlace et pénètre ; et, comme la petite princesse, rapprochée, qui nageait sur le dos, lui criait en riant, avec son air de défi : « Eh bien ! que faites-vous ? venez donc, peureuse ! » Sophor, se pencha, la saisit par une jambe, la tira, l’empoigna toute mouillée, et l’emportant d’une force d’homme, remonta l’escalier de cordes, la coucha sur le pont, malgré des résistances de chatte qui se tourne et s’effile et veut fuir, et la maintint victorieusement.

Dès lors, la princesse Leïlef fut, assez longtemps, auprès de Sophor, comme un joli animal, naguère sauvage, dompté tout à coup. Elle avait renoncé aux résistances. Elle était une petite personne bien obéissante, qui ne se refuse à