Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/325

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
MÉPHISTOPHÉLA

à M. d’Hermelinge, les plus subtiles dénigreuses de leurs amies, la proclamèrent de tout point parfaite ; et « la belle baronne Sophor », c’était le mot qu’on entendait partout.

D’ailleurs, elle excellait à se concilier les femmes par une franchise, par un emportement dans l’amitié, qui, de la part d’une personne comme elle, n’était pas pour déplaire. Elle avait des brusqueries d’éloge, quelquefois, à propos d’une épaule, au bal, ou d’une petite bottine aperçue sur le marche pied d’une voiture, et aussi des caresses subites, tout à fait imprévues ; on s’étonnait à peine, sans être fâchée ; c’était assez naturel, ces enfantillages, chez une jeune femme, presque pas mariée, qui apportait dans le monde la candeur et les zèles des camaraderies de couvent ; bien qu’elle ressemblât à un adolescent presque farouche, on était tentée de lui dire : « Finissez donc, petite fille ; » et l’on était très flattée. Mme de Lurcy-Sévy, fameuse pour la finesse fuselée de ses doigts, dont elle était si fière, disait à qui voulait l’entendre : « Moi, quand la baronne d’Hermelinge tient mes mains, elle ne les lâche plus. » En somme, toutes les mondaines raffolaient d’elle, et, si on la trouvait bizarre, on la jugeait surtout charmante. La comtesse de Grignols, délicieuse-