Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/303

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
293
MÉPHISTOPHÉLA

basse ; Sophor bégayait : « Oui, oui, tu as raison, c’est vrai. » Puis elle se tut. Mais Magalo bavardait. « Que veux-tu ? Il faut s’y attendre, à ces choses-là. Moi, je n’ai pas eu de bébé, parce que j’ai commencé toute petite avec un vieux, et parce que les gens qui nous accompagnent après le bal ou le souper, ne sont pas exigeants. On croit qu’ils achètent une femme ? pas du tout, ils louent un lit. J’en ai entendu ronfler, des hommes ! D’ailleurs, il y a les précautions. Mais toi, on t’a mariée ; ton mari, qui voulait de toi, ne s’est pas endormi, et, ce qui t’arrive, c’est tout naturel. Que ce soit ennuyeux, je ne dis pas non ; parce qu’on souffre beaucoup, à ce qu’il paraît. Pour cela seulement. Ne va pas t’imaginer qu’après, on a un ventre avec des plis, ou une gorge qui tombe. Les bourgeoises, peut-être. Elles ne se soignent pas. Ça leur est égal d’être jolies, ou de ne pas l’être ; pour ce qu’elles en font, de leur corps ! c’est des honnêtes femmes. Même il leur plaît que leurs maris puissent toujours voir qu’elles ont été mères. Elles sont comme les soldats qui ne cachent pas leurs cicatrices ; elles voudraient être décorées pour avoir fait des enfants. Mais nous, accoucher, ça ne nous change pas. Tiens, Hortense, tu sais, je t’ai parlé d’elle ; elle a eu quatre petits,