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MÉPHISTOPHÉLA

grâce et ne veulent pas être exaucées. Et voici que, ce matin, de toute la petite personne de Magalo, frétillante et grésillante si près d’elle, montait avec l’odeur de musc et de tabac du Levant le relent des abandons de naguère ; et parce que Sophie sentit sur sa peau la peau d’ambre chaude, elle ne pensa plus à rien qu’aux extases de naguère, qui s’offraient de nouveau ; et, la tension de sa féminilité exaltée jusqu’à l’énergie virile, elle serra Magalo, toute, sur toute elle ! orgueilleusement affolée de cette frêle forme glissante et souple qui obéissait au moule de l’étreinte, de ces petits os menus qu’en des secousses elle sentait craquer, comme brisés entre ses bras.

C’en était fait, elle était tombée dans le péché où l’avait destinée la loi des mystérieux atavismes, sinon quelque diabolique providence ; et elle n’en resurgirait pas. Malade, ou possédée, elle était vaincue. Elle n’aurait pas pu résister ; elle accepta son destin, elle le voulut ! et, parmi des caresses, elles convinrent que désormais elles habiteraient ensemble ; oui, Sophie et Magalo, ensemble, si différentes pourtant, l’une demoiselle de bonne famille, qui gardait, même dans les véhémences du désir, la tenue et la parole réservée des éducations bourgeoises, l’autre, gamine de banlieue, gâtée en cocotte, et danseuse