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MÉPHISTOPHÉLA

frôlait de petites moues les yeux, les tempes, le nez, et c’étaient mille paroles balbutiées, tendres, mignardes, qui remerciaient, complimentaient. « Non, d’aussi gentilles que toi, il n’y en a jamais eu, jamais ! ah ! bébé, je t’adore. Dis si tu m’aimes, toi, dis-le, dis-le donc. Comment ? pas un mot ? Voilà, c’est peut-être parce que tu étais un peu grise, hier, après le dîner, que tu as voulu ; moi, je n’ai pas besoin de champagne pour être folle. Et de qui suis-je folle ? de vous, chérie, pour toujours. Tu veux bien, toujours ? Hortense ? plus d’Hortense ; ta petite à toi ? plus de petite. Toutes les deux, lâchées ! Nous nous fichons bien des autres. Tourne la tête que je souffle dans tes cheveux. Seulement, il faudra les couper, tes cheveux ; c’est plus drôle, puis c’est l’habitude, et ça me flattera, parce que tout le monde en te voyant, les cheveux courts, avec moi, devinera tout de suite. Je suis fière de toi. Tu parles si bien ! Tu es si bien élevée ! Et, hier soir, tout à fait innocente. Vrai, tu ne savais rien de rien ! ou tu faisais semblant. Non, pas semblant ? Alors, avec ton amie, dans l’île, rien ? la première, c’est moi ? Tiens, mon chéri, je t’adore ! » Pendant ce bavardage d’une bouche si près de sa bouche, Sophie se rappelait tout : son mariage, — l’horrible viol nuptial, — l’évasion, le séjour dans le cha-