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MÉPHISTOPHÉLA

cité la présence et le concours, — que ne hasarderait-on pas en une intention charitable ? — non seulement des comédiennes célèbres, mais aussi des petites cabotines à qui la plénitude avérée de leurs maillots assurait une riche clientèle. Tandis que, sur l’immense estrade, où s’entassaient deux cents musiciens, Céphise Ador, de la Comédie-Française, récitait quelque poème, les duchesses et les marquises, dans le foyer, dans les couloirs, se faisaient présenter par leurs maris ou leurs amants Mlle Anatoline Meyer, des Bouffes, ou Constance Chaput, des Nouveautés, vendeuses de fleurs et de programmes. Une curiosité sans malveillance, un désir de voir de près les jolies créatures dont parlent les chroniques et les échos, attirait les évadées des salons vers les échappées des coulisses ; et il y avait dans le rapprochement des chevelures, des épaules, des bras, la resplendissante confrontation des diamants de famille, dont s’enorgueillirent les aïeules, avec les joyaux récents, mal acquis et bien gagnés, des vendeuses de plaisir. Ce fut la nuit de cette fête, on s’en souvient, que, pour la première fois, se trouvèrent face à face, se considérèrent en la totalité de leurs triomphes, et ressemblantes par le même luxe, par le même éclat, ces deux