Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/249

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
239
MÉPHISTOPHÉLA

chambre toute parfumée des chaleurs d’un sommeil qui a eu un peu de fièvre, il s’inclinait l’oreille vers les bronches ou les poumons. Il ne demandait jamais qu’on écartât la chemise ! c’était à travers des malines qu’il écoutait le va-et-vient du souffle ; mais il excellait à faire sentir d’une pression à peine insistante qu’il constatait la fermeté de la gorge ; et, lorsqu’un mal plus mystérieux le contraignait à de plus intimes observations, il avait une si scrupuleuse manière de se détourner à demi pendant que la malade, d’une main qui hésita longtemps, mettait à nu, en la cernant de batiste en touffe, la très étroite place où pointait quelque roseur, moins qu’un bouton, objet d’une grande inquiétude. Il avait souvent, en ces occasions, d’hypocrites innocences, qui étaient bien faites pour lui concilier l’estime des personnes soucieuses de leur bonne renommée : et, plus d’une fois, il lui arriva de conseiller les plus compliqués médicaments à propos d’une trace un peu rougissante, un peu bleuissante, vers le haut du bras, — qui était la persistance d’un baiser. On n’est pas de meilleur goût. Mais il devenait grave près des malades qui ne sont point malades et souffrent infiniment. Là, il ne souriait plus, il cessait d’être courtois, il redevenait le savant, le penseur, — le