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MÉPHISTOPHÉLA

D’ailleurs, la femme moderne a un dominateur : le médecin. Et il ne pourrait pas en être autrement. Du temps qu’elle avait une âme, ou croyait en avoir une, — ce qui est absolument la même chose, — la femme dépendait du prêtre ; à présent qu’elle est seulement un corps, un corps tressaillant de nerfs, ou s’imagine n’être que cela, — ce qui revient tout à fait au même, — elle se soumet au médecin. Il lui est impossible de ne pas s’avouer ; la confession (de l’avoir compris, sortit le triomphe de l’église catholique), est la loi de l’instinct féminin. Il faut que la femme parle d’elle, menteuse ou non, qu’elle se livre ou feigne de se livrer. Menteuse ? non. Elle est, dès qu’elle parle, convaincue de dire vrai ; et son involontaire hypocrisie ne la soulage pas moins que le plus franc abandon. Or, puisque selon la mode elle est tombée du sentiment à la sensation, de la passion à la névrose, c’est sa chair et ses muscles et ses nerfs qu’elle avoue, véridiquement ou non. Le confesseur était le médecin des âmes, — du temps des âmes, — le médecin est le confesseur des corps. Mais s’il veut maîtriser parfaitement sa malade, sa pénitente, il doit mettre à sauver l’être physique un peu de la religion que le confesseur mettait à guérir l’être moral ; de même que le