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MÉPHISTOPHÉLA

tant de soumission, de tourments, et de convoitise subie et d’appétence enfin mutuelle ? rien. Elle avait été l’imbécile triomphatrice qui n’use pas de sa victoire. Elle avait été la tentation qui a menti, qui a triché, qui damne sans avoir divinisé. Stupide créature, inachevée, infirme, aimant sans savoir aimer, convoitant sans savoir posséder ! Emmeline était partie avec raison, parce que, enfin, ce n’est pas la peine de renoncer à toutes les pudeurs, de s’exposer à tous les reproches d’une conscience qui se souviendra, qui s’examinera, pour l’exaspération d’attendre une ivresse toujours refusée. Ah ! Sophie se serait volontiers arraché avec les ongles toute la chair de son inutile corps qui, voulant et éprouvant, faisait vouloir mais non pas éprouver. Elle ne s’arrêtait pas à cette idée, déjà repoussée, que l’homme seul oblige la femme aux suprêmes joies. Puisqu’elle les connaissait, ces joies, par la femme, d’autres femmes, par la femme, les pouvaient connaître. Seulement les mystérieux rites du culte dont elle était l’oblate instinctive, elle les ignorait ; absolument ? non ; elle soupçonnait, elle entrevoyait, elle devinait presque, mais, — tels du moins qu’ils lui apparaissaient, à peine possibles, — ils étaient si étranges, ces rites, qu’elle avait eu peur de se méprendre, et