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MÉPHISTOPHÉLA

éparses, entouraient de ressemblances la fraîcheur et l’innocence de la vierge endormie.

Dans cette chambre, où elles avaient passé de si bonnes heures, petites filles, puis jeunes filles (car elles venaient s’y reposer parfois, après les jeux dans les jardins, après les promenades en forêt), dans cette chambre où tout était sourire, pudeur, tranquille rêverie, — si différente de l’autre chambre, au second étage de l’autre maison, avec l’horrible lit plein d’un homme ! — Sophie sentait renaître en elle le calme et les ignorances des puériles années ; elle oubliait ce qu’elle avait appris, hélas ! Même elle s’apparaissait meilleure qu’au temps des ardentes dévotions de son adolescence et des emportements dans les poèmes et les musiques ; elle se persuadait qu’elle était, ici, tout à fait pareille à Emmeline ; et, parce qu’elle la trouvait si digne d’être aimée, elle s’aimait de lui ressembler ; pendant plus d’une heure, debout près du lit, un sourire de paradis aux lèvres, elle regarda dormir le pâle visage rose.

Puis, un étonnement lui vint, pour la première fois.

C’était singulier, enfin, cette tendresse qu’elle éprouvait pour son amie. Oui, singulier. Les jeunes filles sans doute se plaisent à rire avec