Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/102

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
MÉPHISTOPHÉLA

de jardins, où voisinaient leurs deux maisons.

Mme Luberti, qui d’ordinaire s’inquiétait peu de leurs absences et de leurs retours, se penchait en avant d’une fenêtre, et, avec des gestes d’automate détraqué, leur faisait signe de se hâter, de venir tout de suite. Elles coururent, elles entrèrent dans le vestibule. La mère de Sophie, descendue à leur rencontre, était en grande toilette, une robe rouge, avec des sequins dans les cheveux ! Elle avait gardé, de son ancienne vie, l’amour des couleurs violentes et du clinquant qui cliquette. Elle était hideuse, — sèche et jaune, — sous le joli de sa coiffure ; l’air d’une saltimbanque squelette.

— Allons, arrivez donc, on vous attend, dit-elle. Que diable faisiez-vous en forêt ? Vous êtes folles, hein ? oui, oui, vous êtes folles, mais tout ça va finir. Vous, Emmeline, rentrez chez vous, vous y trouverez quelqu’un que vous aurez plaisir à voir. C’est une surprise qu’on vous a ménagée. Toi, Sophie, monte dans ta chambre et habille-toi vite. Ta plus belle robe. Va, monte, j’ai à te parler.

Quelques minutes plus tard, Emmeline ayant traversé les jardins, Mme Luberti se trouva seule avec Sophie dans une chambre au premier étage.

— Voilà, dit-elle, c’est tout simple. Il s’agit