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INCENDIE DE L’HÔTEL DE VILLE.

tre universel, comme une malédiction : c’est la tour Saint-Jacques.

Un des trois amis qui sont avec moi sur le toit de la maison, a pu, il y a une heure, se rapprocher de l’Hôtel de Ville.

Il me parle ainsi :

« Au moment où j’arrive, les flammes jaillissent de toutes parts des fenêtres de l’Hôtel de Ville, et l’épouvante la plus intense affole tous les habitants cernés des quartiers adjacents, car une nouvelle s’est répandue depuis quelques jours : on prétend que les souterrains contiennent plus de cinquante mille livres de poudre ! Les incendiaires ont dû répandre le pétrole au hasard et à flots dans les salles, par les escaliers, depuis la salle du Trône jusqu’aux combles. L’incendie, comme un enfer, éclaire Paris de reflets sanglants : sur le quai de l’Institut on peut lire une lettre comme en plein jour. Est-ce la fin de la vieille capitale, que les infâmes amis du Comité de salut public ont ordonnée dans la lâcheté de leur agonie ? Oui, c’est la ruine de tout ce qui fut grand, généreux, rayonnant et consolateur pour la Patrie, qu’ils décident et consomment avec des rires épais, où la terreur et la férocité le disputent à l’abrutissement.

« Au milieu de l’effroi circulent des révélations confuses : on dit que le terrain va propager la chaleur jusqu’aux caves. Et alors, que deviendra tout un quartier s’écroulant à la fois, sautant avec ses habitants et ses richesses ? La chaleur est insupportable entre les Tuileries et l’Hôtel de Ville, c’est-à-dire dans un espace d’environ deux kilomètres. Les deux barricades de la rue de