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SUR LA BUTTE MONTMARTRE.

pour lui, et quelques idées justes formulées par le gouvernement illégitime de l’Hôtel de Ville diminuent notre horreur de ses crimes et notre appréhension de ses forfaits.

Puis — pourquoi ne pas oser le dire ? — Paris, impressionnable, nerveux, romanesque, admire toutes les audaces, et n’a qu’une sympathie modérée pour les prudences. On peut sourire, comme je le faisais tout-à-l’heure, des proclamations emphatiques du Comité central, mais cela n’empêche pas de reconnaître que sa puissance est réelle, et que la façon farouche dont il l’a tout-à-coup révélée, ne manque pas d’un certain caractère de grandeur. On a pu remarquer avec malignité que plus d’un patriote, hier soir, sur les boulevards extérieurs et aux environs de l’Hôtel de Ville, avait bu un peu plus que de raison en l’honneur de la République et de la Commune ; mais cela n’a pas empêché d’éprouver une surprise voisine de l’admiration à la vue de ces bataillons accourus de plusieurs quartiers à un signal invisible, et, en définitive, prêts à se faire tuer pour défendre… quoi ? des canons, mais des canons qui, à leurs yeux, étaient le symbole palpable de leurs droits et de leurs libertés. Pendant ce temps, l’Assemblée nationale légiférait à Versailles et le Gouvernement allait la rejoindre. Paris ne suit pas ceux qui fuient.

VI.

La butte Montmartre est en fête. Le temps est admirable ; on va voir les canons et considérer les barricades.