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LE FAIT-DIVERS.

de son existence, lorsque son amant cessa tout à coup de venir la voir.

« Cette disparition coïncida avec la glorieuse révolution du 18 mars, et la pauvre ouvrière, qui était bonne patriote, trouva quelque soulagement à se dire que ce jour, si malheureux pour elle, était du moins bien heureux pour la France !

« Deux semaines s’écoulèrent. La mère délaissée n’espérait plus revoir le père de ses trois enfants, lorsqu’un soir — c’était vendredi dernier — un homme, enveloppé d’un manteau noir, pénétra dans la maison et demanda au concierge — un bon patriote, commandant du 114e bataillon — si Mlle C… était chez elle. Sur la réponse affirmative de l’héroïque défenseur des droits de Paris, l’homme monta chez l’ouvrière. C’était lui, le séducteur ! Le concierge l’avait reconnu. Que se passa-t-il entre le bourreau et sa victime ? On ne le saura jamais peut-être. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’une heure après, il sortit, toujours enveloppé de son manteau noir.

« Le lendemain et les trois jours suivants, le concierge fut assez étonné de ne pas voir sa locataire du quatrième qui avait coutume de s’arrêter dans la loge quand elle allait acheter de la crème pour son café au lait. Mais le sentiment de ses devoirs comme commandant du 114e bataillon occupait tellement son esprit qu’il accorda peu d’attention à cet incident. Il ne prit pas plus garde à des soupirs et à des sanglots qui descendaient des étages supérieurs. Il ne saurait être blâmé pour cette négligence : il étudiait sa théorie.

« Enfin, le quatrième jour, les cris étaient si violents qu’ils donnèrent de l’inquiétude aux passants, et nous