Page:Mendès - Les 73 journées de la Commune, 1871.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

180
MARDI-GRAS.

les États du pape, d’honnêtes brigands (par pari refertur), qui ne valaient peut-être pas mieux que vous, mais qui au moins n’avaient pas la prétention d’être légaux, et qui faisaient, sans hypocrisie, leur métier de brigands. Quand, par suite de diverses aventures, la troupe n’était plus au complet, ils ne collaient pas des affiches blanches sur les murs pour inviter leurs… administrés à élire des remplaçants ; ils choisissaient tout simplement, parmi les vagabonds et autres gens de bien, ceux qui leur semblaient le plus capables de donner un coup de stylet ou de détrousser un voyageur, et la troupe, convenablement renforcée, reprenait ses occupations antérieures. Que diable, messieurs, il faut dire ce qui est et nommer les choses par leurs noms. Appelons un chat un chat et Pilotel un voleur. Le temps des illusions est passé ; ne vous obstinez pas à garder les masques ; nous avons vu les visages. Après le mardi-gras de la Commune, voici le mercredi des cendres. Vous vous étiez habilement déguisés, messieurs ! vous aviez été chercher dans le vestiaire de l’histoire les vieilles défroques révolutionnaires des hommes de 93, vous y aviez ajouté quelques ornements à la mode actuelle — gilets dits de la Commune, chapeaux dits de la Fédération — et ainsi parés, vous vous carriez. À vrai dire, on croyait s’apercevoir que ces habits, faits pour des géants, étaient trop larges pour vous, pygmées ; ils flottaient autour de vos petites tailles comme des ballons dégonflés ; mais, rusés, vous disiez : « Ce sont les persécutions qui nous ont maigris ! » On remarqua aussi, dès les premiers jours, quelques taches rouges comme du sang, toutes fraîches, sur vos vête-