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LA CONCILIATION.

là ; ils portaient sur l’épaule des bâtons terminés par des lames de couteaux ou par des clous. Ils se comptèrent et se numérotèrent ; les chefs — ils avaient des chefs — leur commandèrent de se former en demi-section, puis on se mit en marche, dans la direction de la barrière de Charenton ; un baby marchait devant eux, soufflant dans un clairon acheté à un marchand de joujoux ; ils avaient une cantinière aussi, petite fille de six ans. Bientôt ils rencontrèrent une autre troupe d’enfants à peu près égale en nombre. Cette rencontre était-elle prévue ? avait-il été décidé qu’il y aurait bataille ? On ne sait. Le fait est que le combat ne tarda pas à s’engager entre les deux partis, dont l’un figurait l’armée versaillaise et l’autre l’armée fédérée. Oui, combat, un véritable combat, que les habitants du quartier n’interrompirent qu’avec la plus grande difficulté ; et il y a eu des morts et des blessés, comme disent les dépêches officielles de la Commune : Alexis Mercier, âgé de douze ans, que ses camarades venaient d’élever au grade de capitaine, a été tué d’un coup de couteau dans le bas-ventre.

Ah ! croyez-le, ces femmes ivres de haine, ces enfants qui jouent au meurtre, ce sont de terribles symptômes. Encore quelques jours et le vertige de la tuerie va s’emparer de Paris.

XLII.

La conciliation, peut-on l’espérer encore ? Hélas ! je ne crois pas. Notre situation sanglante aura une sanglante